Châteauneuf-sur-Charente (16090)

 
CHÂTEAUNEUF. La " Jeanne Edouard " 
Patron: Moulin à Brives.

CHATEAUNEUF SUR CHARENTE.



Géographie historique et communale de la Charente.... par J. Martin-Buchey,... Martin-Buchey, Jules (1850-1918).

COMMUNE DE CHATEAUNEUF
Superficie = 2 395 hect. ; Population = 2.941 habitants.

La petite ville de Châteauneuf, l'une des plus agréables de notre département, s'étend sur la rive gauche de la Charente, au fond d'une des grandes courbes du fleuve.

Son origine doit être très ancienne et son. territoire a dû être habité dès les temps préhistoriques. Les recherches, faites dans les nombreuses grottes que l'on rencontre aux environs, ont en effet
permis de recueillir une grande quantité de silex taillés et d'outils des premiers âges de l'humanité, ce qui indique bien que ces grottes ont dû servir de refuge aux hommes de l'époque quaternaire.

Les traces de la période gallo-romaine se retrouvent principalement sur la rive droite du fleuve, dans le territoire de l'ancienne commune de Saint-Surin, aujourd'hui réunie à celle de Châteauneuf, dont elle n'était séparée que par la Charente. Nous y trouvons des noms de villages très significatifs, tels que Etaules, qui dérive d'étable, Coutardières, Pellegeais, qui rappellent l'industrie ou la préparation des peaux.

Un cimetière gallo-romain, contenant des tombes de guerriers, a été découvert près du village du Gré,
Si nous en croyons notre vieux chroniqueur, Corlieu, Châteauneuf n'était dans les premiers temps du Moyen-Age, qu'un petit bourg, appelé Berdeville. Ce bourg était défendu par un château,
probablement construit en bois, qui s'élevait dans une île de la Charente appelée encore aujourd 'hui Calais. En 1081, ce château fut détruit par un incendie et remplacé par un autre, qui fit donner
au bourg de Berdeville, le nom de Château-Neuf. (...)
Dans le principe, la seigneurie de Châteauneuf fit partie du domaine des comtes d'Angoulême. Cédée au onzième siècle à des seigneurs particuliers, elle fut rachetée au treizième siècle par Hugues
de Lusignan et sa femme, Isabelle Taillefer, qui la transmirent par testament à leur troisième fils, Geoffroy. Ce dernier hérita également de la terre de Jarnac ; il laissa Jarnac et Châteauneuf à son
fils Geoffroy II, qui mourut sans postérité, en 1305, et qui eut pour héritier son neveu, Dreux de Mello IV, fils de sa sœur, Eustache de Lusignan.

Nous trouvons ensuite, comme seigneur de Châteauneuf, Raoul, comte d'Eu, connétable de France, qui, ayant conspiré contre le roi, fut condamné à mort et exécuté, en 1350. Ses biens furent
confisqués et le quint ou cinquième de la terre de Châteauneuf fut dévolu à la Couronne.

Les quatre autres quints de Châteauneuf passèrent successivement entre différentes mains et devinrent ensuite la propriété de Guillaume de Craon, dont la fille, Marguerite, épousa Guy VIII de
La Rochefoucauld.

A son retour de captivité, le comte Jean d'Angoulême racheta de Jean de La Rochefoucauld les quatre quints de Châteauneuf, qui firent retour à la Couronne après la mort de la duchesse Louise de
Sa voie, en 1531.

Pendant les seizième, dix-septième et dix-huitième siècles, la seigneurie de Châteauneuf fut engagée successivement à plusieurs familles. En 1568 elle fut engagée à Mme de Mortemart et à ses enfants, MM. de Rochechouart qui, en 1597, passèrent leur engagement au duc d'Epernon, gouverneur de l'Angoumois.

Châteauneuf passa ensuite entre les mains du maréchal de Navaille. puis, à Jean Paris de Montmartel, qui le transmit à son fils le marquis de Brunoy. (...)
Le rôle de Châteauneuf fut plus important pendant la guerre de Cent ans. Cette ville avait été cédée à l'Angleterre par le traité de Brétigny, en 1360. Les Anglais attachaient une grande importance
à la possession de cette petite ville, qui commandait le seul pont de pierre existant entre Angoulême et Cognac.

Appuyés sur Châteauneuf et sur la forteresse voisine de Bouteville, ils étaient absolument maîtres de tout le pays. Aussi lorsque, en 1376, le duc de Berry, après s'être emparé de Merpins, vint
assiéger Châteauneuf, ils lui opposèrent une énergique résistance.

Secondés par la garnison anglaise du château de Bouteville, qui harcelait les assiégeants et qui trouvait moyen de ravitailler la place en vivres et en munitions, les défenseurs de Châteauneuf
tenaient tête à leurs agresseurs et refusaient de se rendre. Il fallut que le roi Charles V vint en personne diriger les opérations du siège. Enfin la place dut capituler ; le siège avait duré quatre ans (1380).(...)
Pendant les troubles de la Gabelle, Châteauneuf joua un rôle assez important. C'est à Châteauneuf en effet que se passa le premier acte de cette insurrection ; quelques mutins ayant été enfermés
dans les prisons de cette ville, les insurgés descendirent de Jurignac à Châteauneuf et délivrèrent leurs camarades. Le fermier du sel, Texeron, s'enfuit précipitamment.

C'est également à Châteauneuf que se concentrèrent les troupes du duc d'Aumale, avant de se porter sur Langon, où elles devaient rejoindre les troupes du connétable de Montmorency.

Après la répression de ce mouvement insurrectionnel, une compagnie de gendarmes fut laissée en garnison à Chàteauneuf ; elle y commit de nombreux excès.

Les premiers événements des guerres religieuses n'eurent pas, à Châteauneuf une grande répercussion.(...)
Lorsque commença, en mars 1569, la campagne qui devait mettre aux prises les catholiques et les protestants dans la plaine de Bassac, le château de Châteauneuf était occupé par un officier protestant, qui avait sous ses ordres une soixantaine de soldats. La possession de cette place était jugée nécessaire par le maréchal de Tavannes, qui commandait l'armée catholique sous les ordres du
duc d'Anjou. Aussi, après avoir contourné la ville d'Angoulême, qui était entre les mains des protestants, l'armée royale se dirigea-t-elle sur Châteauneuf.

Attaqué vigoureusement par l'artillerie, le château ne pouvait résister longtemps. Le capitaine protestant dut capituler ; mais, avant de rendre la place, il eut soin de faire démolir deux arches
du pont et de faire couler tous les bateaux, de façon à empêcher l'armée royale de passer sur la rive droite du fleuve.
 Le lendemain soir, le pont de pierre était réparé et un pont de bateaux établi, à environ quarante mètres plus bas. Afin de mieux tromper l'armée protestante, de grands feux furent allumés sur la
plate-forme du château et, à la faveur de la nuit, toute l'armée catholique put passer sur la rive droite de la Charente.

Le 15 mars, les protestants étaient complètement défaits dans la prairie de Bassac, et leur chef, le prince de Condé, lâchement assassiné.

Pour en terminer avec le rôle joué par Châteauneuf pendant les guerres de religion, il nous suffira de signaler les deux faits suivants. En 1574, c'est à Châteauneuf que les troupes catholiques
passèrent la Charente pour aller reprendre le château de Bouteville, dont les protestants s'étaient emparés. Pendant l'hiver de 1585, le duc de Mayenne, commandant l'armée royale, vint camper à Châteauneuf.(...)
Bien que, dans les anciens titres, Châteauneuf porte le nom de ville qui, au Moyen-Age, ne s'appliquait qu'aux agglomérations ceintes de remparts, aucun document ne permet d'affirmer que
cette petite ville fût entourée de murailles. En revanche de nombreux titres nous parlent des portes et des fossés qui donnaient accès dans la ville ou qui la protégeaient.

Il y avait trois portes : la porte du Pont, située à l'extrémité du pont ; la porte du Plaineau, à l'entrée de ce faubourg, et une troisième, dénommée le Pourtal de la Ville, qui desservait les chemins d'Angeac et de Bouteville.

Il y avait également de nombreux fiefs nobles dans Châteauneuf ; nous ne nous occuperons que des principaux.

Le fief de Barqueville appartenait, au quinzième siècle, à la famille Bompart, qui possédait également la seigneurie de Puyrobert, dans la paroisse de Champniers A la fin du seizième siècle et au commencement du dix-septième, nous trouvons, comme seigneur de Barqueville, Jacques Catrix, petit-fils de Marie Bompart, qui laissa cette seigneurie à son fils, Henri Catrix.(...)
A la fin du quinzième siècle, le logis et la seigneurie du Tillet étaient la propriété de Me Hélie du Tillet, personnage important qui fut vice-président de la Chambre des Comptes, à Paris, puis maire
d'Angoulème en 1502 et 1503. Vers le milieu du seizième siècle, le Tillet fut acquis par Jean des Ages, seigneur de Macqueville, qui le laissa à François des Ages, sieur de Maumont. La fille de
François des Ages, Bertrande, épousa François de La Rochefoucauld d'Orbé qui, par acte du 28 janvier 1608, vendit le Tillet à Raymond de Forgues, baron de Larochandry.

Le logis et la seigneurie du Tillet furent alors séparés. La seigneurie demeura dans la famille de Forgues jusque vers la fin du dix-septième siècle; puis elle passa dans la famille Fé.

Quant au logis du Tillet, il fut cédé par Raymond de Forgues à François Redon, sieur de Neuillac. Il fut ensuite acquis par Antoine Leviste, receveur des consignations de la Prévôté royale de Château-
neuf, qui, par acte du 4 novembre 1624, l'arrenta à Michel Guimberteau, écuyer, sieur du Treuil. Les héritiers de ce dernier l'arrentèrent à leur tour, le 25 avril 1651, à François Guillot, sieur de
la Puisade, conseiller du roi, juge-prévôt de Châteauneuf. Les héritiers du sieur de la Puisade conservèrent le logis du Tillet pendant les dix-septième et dix-huitième siècles.

La seigneurie de Vignes, qui s'étendait sur les deux paroisses de Mosnac et de Châteauneuf, avait son siège dans cette dernière paroisse. Elle appartenait, au quinzième siècle à Jean Gastaud,
seigneur d'Etau les, qui la tenait à titre d'héritier de Guillaume de Vibrac. Pendant la première moitié du seizième siècle, la seigneurie de Vignes changea fréquemment de propriétaire et, le 18 novembre 1557, elle fut acquise par Philippe Gandillaud, procureur du roi à Châteauneuf, qui l'échangea à Jean Tesseron, bourgeois de Châteauneuf, contre le fief des Plassons.(...)
La ville de Châteauneuf (1853 hab.), à vingt-cinq kilomètres est de Cognac, est dans une très agréable situation, sur la rive gauche de la Charente, à l'endroit où le fleuve est rejoint par un petit
affluent, le Biau, qui parcourt une vallée des plus pittoresques. Une magnifique avenue, plantée de beaux marronniers, unit la gare au centre de la ville, où l'on voit un joli hôtel-de-ville.

C'est une ville commerçante, qui a beaucoup souffert de la crise phylloxérique, mais à laquelle la reconstitution des vignobles a rend u son ancienne prospérité. On y trouve d'importantes maisons
d'exportation, parmi lesquelles nous pouvons citer les maisons E. Normandin et Cie, V. Fournier et Cie, Ed. Gaudry, A. Tesseron, etc., etc. 
L'industrie est représentée par deux importantes manufactures : une manufacture de feutres pour la papeterie, dirigée par M. Mattard et une manufacture de chaussures, dont le propriétaire est M. Rochon.  De bonnes foires se tiennent,le 16 de chaque mois,à Châteauneuf, qui possède une perception, un bureau de poste et deux études de notaire.

(...)
Le monument le plus remarquable de Châteauneuf est son église, classée parmi les monuments  historiques.

Cette église a remplacé un monument beaucoup plus ancien et contemporain de la chapelle de St-Jean, que les traditions locales affirment exister dans le cimetière et qui est, sans aucun doute,
l'ossuaire caché sous la terre à l'extrémité sud-ouest, dont le plan très curieux et les détails architecturaux ne peuvent concorder qu'avec la destination d'un baptistère.

L'église Saint-Pierre de Châteauneuf fut fondée, au dire de l'historien Corlieu, par Guillaume III Taillefer, qui administra l'Angoumois de 1087 à 1120.

Cette date est précieuse pour l'étude de cette église, qui est une des plus belles du département.

C'est une basilique à trois nefs, terminée par un transept, que couronnaient, à l'origine, trois absides séparées par deux chevets rectangulaires répondant aux basses nefs.

On dut, au quinzième siècle, reconstruire le sanctuaire principal et les chapelles du nord.

La sculpture de l'église de Châteauneuf, les belles proportions de ses nefs et surtout sa magnifique façade en font un sujet d'étude pour les archéologues.

Dans l'arcade nord de cette façade on rencontre la statue équestre de l'énigmatique personnage, dans lequel on veut voir tour à tour un Saint-Martin, un Saint-Georges, l'empereur Constantin, ou plus
simplement le fondateur de l'église, cette dernière hypothèse étant en réalité celle qui soulève le moins d'objections.

Depuis soixante ans, l'église de Châteauneuf est l'objet d'une restauration, commencée par M. Paul Abadie. Ce travail n'est point achevé; néanmoins, dans son mobilier encore incomplet, on
doit, signaler une belle sonnerie de sept cloches, un magnifique chemin de croix, un confessionnal d'un dessin remarquable et une artistique série de belles verrières.(...)

Commentaires